Kell, mains dans les poches et sourcils froncés, faisait des allers et retours depuis un peu plus d'une demie-heure devant la boutique qui portait l'enseigne "Un Air de Campagne" et ses quelques fleurs exposées à l'extérieur. Il s'arrêtait parfois, regardait au travers de la vitre et reprenait aussitôt sa marche. Comme à son habitude lorsqu'il était en train de se prendre la tête sur un sujet quelconque, Kell pestait contre le monde, l'insultant tout bas. Il se passait le dos de la main sur le front, s'arrêtait, croisait les bras... On pourrait dire, en somme, qu'il était indécis.

Passées encore dix minutes, il se décida à franchir le pas et passa la porte de la boutique d'un pas sûr. Ses capacités olfactives développées, il se retrouva envahi d'une nuée d'odeurs florales. Il s'apprêtait à pester une fois de plus de l'odeur envahissante, mais, un miracle eut lieu, et il se demanda pourquoi il ragerait contre ces parfums qui lui étaient plutôt, voire carrément, agréables au nez. Il fit le tour de la pièce de son regard, se demandant ce qui conviendrait le plus.

- Raaaaaaah...!

Il venait de s'imaginer en situation, et cela lui déplaisait plus que fortement ; il n'aimait pas passer pour un type sensible, cela salissait son image de mec pur et dur. Bon, il savait qu'il était parfois pris d'élans que ce genre de types ne connaissaient sûrement pas, mais du moment que ça restait personnel et dans sa tête, c'était supportable. Par contre, dès qu'il fallait le montrer, ça devenait moins supportable, c'était même humiliant. Selon lui toujours. Si bien qu'il n'osait même pas demander des conseils au vendeur, préférant même ne pas le regarder, de peur de croiser son regard. Il préférait penser à sa honte future, tout en contemplant des magnolias...

- "Ma-gno-lia".

Kell retint se retint de sursauter. Il ne s'attendait pas à ce que quelqu'un surgisse dans son dos, et encore moins quelqu'un qui n'était pas le teneur de cette boutique. Il tenta de garder un rythme de respiration normal, malgré cette frayeur.

-T'aimes ça toi les magnolias ? J'avoue que c'est plutôt joli. Ça se met dans un appart tu crois ? J'ai peur que ça devienne immense et que je sache plus quoi en faire...

L'asiat' se retourne doucement et se retrouve nez à nez avec une grande blonde. Grande. Pour une fille. Il ouvre la bouche pour lui cracher une insulte, qui le vengerait selon lui de la peur qu'il avait eu quelques secondes plus tôt. Finalement, il resta plutôt soft, à défaut d'avoir déjà insulté une nana.

- Putain !

Il se recula un peu de la grande blonde, la trouvant trop proche de lui, et se tint le plus droit possible. Pourquoi ? C'était une bonne question. Kell lui-même ne savait pas exactement ce qui lui prenait. C'était certainement pour regarder la fille de haut. Il constata alors qu'elle était vraiment pas mal foutue, pour une nana. Un peu "trop" nana à son goût quand même. Mais il pouvait jurer qu'il n'avait jamais vu une nana avec des hanches aussi marquées. Ca devait être gênant dans les petites ruelles, rit-il intérieurement. C'était vraiment pas le genre de Kell de se moquer si facilement, mais il avait de la rancune, et son ego n'aimait pas se prendre des coups. Aussi insignifiants puissent-ils être.

- J'ai une tête de fleuriste, sérieux ?! Tu crois que je sais si les magnolias ça va dans un appartement ? Est-ce que j'ai l'air, même, d'être le genre de mec à acheter des magnolias ?!

Il pesta et lui jeta un regard en coin, le visage habillé d'un air qu'il se voulait le plus méprisant possible, ce qui n'était pas totalement conscient. Sérieusement, c'était quoi cette meuf ? Qu'est-ce qu'elle avait l'air con en plus. Kell imaginait déjà les heures que cette nana avait dû passer à faire les magasins, à se prendre en photo dans le miroir de sa salle de bain, à se maquiller avant de sortir... Elle avait l'air si superficielle. Si vide donc. Kell se demandait d'ailleurs pourquoi il restait là au lieu de partir tout simplement. Il n'avait rien à lui dire. Il était juste passé. Ou quelque chose comme ça. Bon ok si, il était venu acheter des fleurs, mais c'était clairement pas avouable.

- J'sais pas où est le fleuriste, mais attends pas d'conseils de ma part, j'y connais que dalle aux plantes.

La blonde me regarda longuement. J'pense pas avoir été dévisagé aussi longtemps de ma vie, qui plus est, par une nana. J'avais l'impression qu'elle lisait dans mes pensées, et cette idée me fit un peu flipper. Je rencontrais des gens vraiment pas ordinaires ces temps-ci. Tous tombés ici lors de la dernière pluie ou quoi ? L'expression me fit rire et me rappelait une blague assez conne que m'avait sortie Marc un jour, alors que Louis lui avait dit que, justement, il était pas né de la dernière pluie. "Mais tu sais que dans les pays d'Afrique, par exemple, au Sahara, si tu dis que tu es né de la dernière pluie, ça veut dire que t'es méga vieux ?" Et on avait éclaté de rire comme des cons, alors qu'au fond, c'est pas drôle de rire du malheur des autres. En même temps, si ça se trouve, ça existait pas, les pays où il pleuvait peu. Qu'est-ce que j'en savais ? Et qu'est-ce que j'en saurais jamais surtout, vu que j'suis parti pour passer les quatre-vingt années de ma vie ici.

- Je ne pense pas que le fleuriste daigne sortir de la réserve aujourd'hui, tant pis pour les conseils. En attendant, je te donne ma carte de visite, on cherche des hommes dans le métier, ça se tarit tellement que ça devient une sorte de matière première rare !

La voix de la blonde me ramena sur terre, à la dure réalité : j'étais pas en train de me poiler avec mes potes, mais de me faire coller par une nana vachement bizarre. Elle me tendit un bout de papier, et comme j'avais pas entendu vraiment ce qu'elle venait de dire, je pensais qu'elle essayait de me refiler son numéro de téléphone. Ca craint, les gens qui te donnent des rendez-vous comme ça, alors que ça fait à peine deux minutes qu'on se connait. Deux minutes extrêmement longues, certes, mais deux minutes quand même. Par instinct de politesse -merci maman-, j'attrapais malgré tout la carte, sans même y jeter un coup d’œil. Je pourrais toujours lui dire que je savais pas lire, mais si jamais elle connaissait des gens que je connais et qu'elle le leur disait, je passerais pour quoi, moi ?
Elle ajouta :

- Si jamais tu cherches à te faire des sous facile, je pourrais te pistonner.

Je levais un sourcil en la regardant, perplexe. Forcément, quand on parle de fric, Kell a un cerveau beaucoup plus réceptif. C'est pas comme si j'en manquais, mais l'idée de pouvoir me payer une soirée ciné-alcool avec les potes prochainement me plaisait pas mal. En même temps, j'avais clairement pas envie de me prostituer, pareil que pour la raison précédente : je passe pour quoi après ? C'est pas comme si on était un tout petit village de cinquante personnes, mais on pouvait quand même bien vite connaître les gens s'ils faisaient parler un tant soit peu d'eux. J'imaginais déjà la réputation à chier. Déjà que j'essayais de rester discret, mais là, j'aurais plus du tout un espoir de vie paisible.
Je secouais la tête et me décidais à regarder la carte, au moins pour arrêter de me faire des films : je suis pas le genre de mec à qui on demande de se prostituer, voyons Kell, sois réfléchi. "Amethyst LEE". Déjà, juste ça, ça sentait le surnom ou pseudonyme à la con. Qui aurait l'idée de s'appeler "Amethyst", et surtout "Lee", quand on a pas une tête de bridé ? Elle croyait avoir qui comme ça, au juste ? Enfin passons, elle s'appelait peut-être "Jeannette", auquel cas, j'aurais aussi pris un surnom... Je me tus en pensée durant quelques secondes, le temps de me faire remarquer que moi aussi, je donnais pas mon vrai prénom, faute d'en avoir un à coucher dehors. Heureusement que j'avais rien eu le temps de dire à haute voix, je me serais senti con. Surtout devant une fille comme elle.

- Je dois faire quoi de ce bout de papier ? Tu veux mon numéro de téléphone aussi ?

Je comprenais pas ce que je devais dire, j'aurais dû écouter, au lieu de me faire des vannes tout seul.

- C'est ma carte, je suis mannequin. Si tu es intéressé par le mannequinat je pourrais parler de toi à mes supérieurs, tu as le physique adapté, je pense. De toute façon comme il y a très peu d'hommes, ils ne sont pas trop pointilleux.

Je fronçais les sourcils à sa dernière phrase. "Pas trop pointilleux" ? Ça voulait dire quoi, ça ? Si elle, elle pouvait être mannequin, évidemment que je pouvais l'être aussi. Mais c'était pas un truc qui m'intéressait en même temps, donc bon, elle devait bien le voir. Et forcément aussi, avec ma tête de castagneur, ça d'vait pas plaire aux agences. Les mecs qui faisaient ce genre de boulot, c'était toujours des mecs trop clean, comme Caleb, un peu. Le genre de mec qu'on maquille avec du rouge pour faire croire qu'ils se sont battus deux minutes avant le shooting.
J'ouvris la bouche pour répondre lorsque je m'aperçus de son jeu de pieds. Elle était en train de sautiller sur place, un peu comme un sportif qui veut pas lâcher l'entrainement alors qu'il va s'acheter un beignet dans une boulangerie et qui continue à faire son "sport" en faisant bien chier tout l'monde au passage. J'exagérais, elle en était pas là, la demoiselle Lee, mais ça m'y avait fait penser.
Essayant de ne pas prêter plus d'attention que ça à son attitude, je finis par répondre :

- C'est gentil d'avoir pensé à moi, mais j'crois que tu t'es trompée de mec. J'pense pas avoir la tête de l'emploi.

J'ajoutais pour appuyer mes propos :

- Tu m'vois marcher là...

Je commençais à mimer les mecs dans les défilés de mode, un pied devant l'autre, la tête haute, la main portant un sac invisible, tout en restant sérieux, parce que ça me faisait clairement pas rire de me mettre à imiter ces clampins.

- ...comme ces clowns qui pètent plus haut que leur cul ? Sérieus'ment ?

Je levais les sourcils en attendant sa réponse, la fixant dans le blancs des yeux, les miens grands ouverts.

- Madame, monsieur... Veuillez m'excuser, je ne vous ai pas entendus.

Merde.

- Puis-je vous aider ? Vous semblez intéressés par nos boutures de magnolia...

Je jetais un regard noir à Lee, l'accusant de ne pas m'avoir fait un signe, ni même de m'avoir laissé un indice quelconque qui m'aurait indiqué qu'on n'était pas seuls dans cette boutique.. Pensée totalement absurde : bien sûr qu'on n'était pas seuls dans cette boutique, y'avait au moins le vendeur quelque part, mais il faisait le mort, cet imbécile. Je dévisageais Lee quelques secondes, le temps de passer mes nerfs intérieurement sur elle, lorsque je la vis enfin esquisser un sourire pour répondre au vendeur.

- Oui les magnolias... Eh bien en effet, puisque vous en parlez, je me demandais si je pouvais en avoir, comme je vis dans un appartement... J'y connais rien en fait !

Elle devait jubiler, tout comme j'aurais jubilé en mon fort intérieur si j'avais été à sa place. Je ne pouvais pas lui en vouloir vraiment, la scène aurait été très drôle si les rôles avaient été inversés. Seulement, c'est moi qui avais pris, et je trouvais ça moyennement amusant.
Je relâchais mes bras, lentement, me grattait la gorge un coup, pour me remettre de ma gêne, que dis-je, de la honte immense et de l'humiliation que je venais d'endurer et me tournais vers le fleuriste, qui nous regardait...avec une sorte de stupéfaction dans les yeux ?  

- Ça devient pas genre... hyper grand ? ajouta-t-elle à l'intention du fleuriste.

Je me sentais un peu de trop, ne sachant que dire ni que faire. J'aurais préféré disparaître, dans un nuage de fumée. Ou quelque chose comme ça. Je me passais la main sur la bouche, par réflexe, puis étirais un peu on col, pensant que ça me permettrait d'être plus à l'aise, de mieux respirer, ou j'sais pas trop en fait. Résigné à ne pas dire un mot- je voulais pas davantage passer pour un abruti-, je fixais des fleurs au hasard, attendant que quelque chose se passe.

Heureusement pour moi, la conversation suivit son cours, presque naturellement. J'sentais la grande blonde se foutre de moi intérieurement, mais je préférais regarder le fleuriste, qui avait l'air de ne pas se poser trop de questions. A vrai dire, je me doutais qu'il avait au moins dû rire intérieurement aussi, mais je sentais pas qu'il me narguait, contrairement à Lee.
Je croisais les bras, et attendis. Je voulais fuir, mais si je pouvais le faire discrètement, ce s'rait mieux.

- En effet, un magnolia n'est pas recommandé dans un appartement. Ce que vous voyez ici ne sont que de jeunes pousses. En fait, un magnolia est un arbre, il faut donc le planter en pleine terre... À l'âge adulte, il peut atteindre trois mètres de haut et environ deux mètres de large.

J'essayais de tendre l'oreille, de montrer un intérêt pour ce que racontait le vendeur. Qui était minuscule au passage, souriais-je. Normal qu'il vende des fleurs. En fait, j'avais besoin d'exprimer ma colère sur ce qui m'entourait, et, désolé pour le fleuriste, mais comme je le regardais, à défaut de pouvoir regarder ailleurs, c'était lui qui prenait ma frustration en pleine face.

- Si vous le désirez, je peux vous montrer d'autres plantes d'appartement qui pourraient vous convenir... Et vous monsieur ? Vous êtes venu avec madame ou vous cherchez autre chose ?

Je me mordis la langue en entendant qu'il s'adressait à moi. Lee se tourna aussi pour, certainement, attendre une réaction de ma part, et je me sentis soudain très con : pourquoi est-ce que j'avais foutu le pied chez un fleuriste bordel ? J'allais pas dire que j'étais v'nu chercher des fleurs, surtout devant cette grande nana, qui profiterait de l'occasion pour se foutre encore de moi. Je lui jetais un regard en coin, ouvris la bouche pour ne pas laisser ce lourd silence continuer à s'étendre, mais Lee fut plus rapide que moi et répondit, toute joie :

- Oui, en effet, si vous avez des cactus qui ne font pas trois mètres sur deux, je veux bien regarder ! Et toi ?

Elle m'adressa un sourire, auquel je faillis répondre d'une grimace, mais je choisis de m'abstenir : on n'était pas seuls. Son « et toi ? » m'affola, mais je décidais de rester un maximum impassible, les bras croisés dans le dos, mon corps se balançant doucement d'avant en arrière.

- Tu vas prendre quelque chose finalement ?

J'pensais qu'elle serait gentille et qu'elle embarquerait le petit fleuriste, mais non, c'était juste pour me donner un faux espoir. Espoir sur lequel j'avais crédulement bondi. Une nouvelle fois, j'ouvris la bouche pour lui balancer quelques insultes bien pesées, mais, encore une fois, le fait que nous n'étions pas seuls m'en retint.

- J'étais juste passé pour regarder. C'est pour ma mère, ajoutais-je empressement pour qu'on ne pense pas que j'étais venu acheter des fleurs pour quelqu'un d'autre ou pour moi.

Je forçais un peu sur mon sourire pour ne pas trop paraître désagréable.

J'sais pas pourquoi, mais j'avais l'impression que ces deux-là n'allaient pas avaler mon excuse. C'était pas si faux pourtant. J'étais venu pour ma mère. Pour qui d'autre sinon ?
L'auto-persuasion n'avait pas les effets escomptés sur ma pensée, et ça me désola plus qu'autre chose en fin de compte.
Mais comme finalement personne ne fit de remarque, j'en conclus que c'était passé crème. Si le vendeur avait rien r'marqué en même temps, ça m'semblait normal que la blonde n'ait rien vu non plus.

- Je vous laisse regarder dans ce cas, prenez votre temps. Mademoiselle, les cactus sont par ici. Nous ne sommes pas très fournis en ce moment car les cactus sont rares sur l'île... Je peux vous proposer ce cactus de Noël qui fleurit abondamment en hiver... Ou bien ce Gymnocalycium, qui vit longtemps et fleurit de manière assez spectaculaire ! Pour finir, peut-être que cet Oponce vous plairait. Lui fait de grosses fleurs jaunes ou oranges. Je m'excuse encore une fois, c'est à peu près tout ce qui nous reste comme cactus décoratifs...

Je fixais le fleuriste. J'savais pas si j'étais perplexe, désœuvré, perdu. P't'être un peu de tout. J'avais l'impression de pas avoir saisi un fichtre mot de ce qu'il venait de raconter, hormis "cactus de Noël". Heureus'ment qu'il y avait des étiquettes devant les pots. Parce que je serais pas fichu de lui ressortir un traître mot de ce qu'il avait dit.
Le téléphone de la boutique se mit à sonner, et je bénissais des dieux inexistants d'avoir éloigné le fleuriste.
C'était le moment de filer en douce. Je reculais d'un pas, doucement, pendant que Lee regardait les cactus et repensais aux magnolias. Je ne pouvais pas partir avec alors que la blonde était présente, mais je ne voulais pas non plus partir sans...En même temps, comment est-ce que j'allais bien pouvoir faire si cette chose n'existe qu'à l'état d'arbre ? Je regardais alternativement Lee et les fleurs, cherchant un moyen intelligent pour m'en sortir le plus satisfait possible.

- Veuillez m'excuser. Le propriétaire a fait un malaise ce matin et je viens d'avoir de ses nouvelles. Mademoiselle, avez-vous fait votre choix ?

Sursautant à la voix du fleuriste revenu, je me tournais vers les autres plantes, faisant mine de chercher quelque chose en particulier.

- Rien de grave, j'espère ?

Mince, je devais le faire vraiment chier avec mes conneries. Il devait avoir autre chose à faire que de s'occuper d'un type qui n'assume pas de faire des achats trop peu virils à son goût. J'étais vraiment entêté, avec mes clichés de trucs virils et de trucs de nanas. J'savais pertinemment que ce genre de barrières n'existait que parce que la pensée générale les entretenait. Je m'en plaignais tout en en faisant de même. Quelle belle preuve d'intelligence, Qaeli Kath...

- Je vais prendre un cactus de Noël, ils sont très jolis.

Soucieux du dérangement que j'étais en train de causer au fleuriste, qui était plutôt cool malgré les problèmes de santé du proprio, je me remis à côté de Lee, bien décidé à passer outre mes à priori de gros beauf.

- J'voulais savoir si les magnolias, ça existait en petit. 'Pas que les cactus me plaisent pas, hun, j'préférerais les fleurs en fait. Ma mère.

Encore un rattrapage en beauté dans un univers parallèle : j'avais conscience que mes mensonges n'étaient gobés de personne. J'sentais aussi la difficulté que j'avais à aligner naturellement mes mots. En même temps, c'était vraiment gênant, de demander des fleurs, quand on essaye d'entretenir une certaine image de mec à fuir. Je continuais néanmoins, pour préciser mes attentes :

- Un bonsaï de magnolia, ça existe pas ? Même avec une seule fleur dessus, ça m'va.

Je me pinçais les lèvres et croisais les bras dans mon dos après ma dernière intervention. Je croisais aussi les doigts dans ma tête, pour ne pas subir davantage d'humiliation.